Pour les propriétaires, la hausse des taux équivaut à des paiements supplémentaires de 15 milliards de dollars par année
Quand ils renouvelleront leurs prêts hypothécaires au cours des prochaines années, les ménages devraient voir leurs paiements augmenter. Leurs mensualités moyennes pourraient croître de 30 à 40 %. Cela dit, les propriétaires feront ce qu’ils peuvent pour continuer à payer leurs mensualités à temps. Les emprunteurs au Canada ont tendance à accorder la priorité à leurs paiements hypothécaires plutôt qu’à leurs autres dettes et choix de consommation.
Selon les estimations, la hausse des taux d’intérêt représentera 15 milliards de dollars supplémentaires que les propriétaires devront débourser chaque année pour s’assurer que leurs paiements sont faits à temps.
Par exemple, pour un prêt hypothécaire de 500 000 $ contracté à un taux d’intérêt fixe sur cinq ans avec une période d’amortissement de 25 ans, une hausse faisant passer le taux d’intérêt de 1,94 à 5,45 % se traduirait par une augmentation de près de 1 000 $ par mois.
1,94 % |
0 $ (base de référence) |
5,45 % |
950 $ |
Différentes options pour les propriétaires
De manière générale, différentes solutions s’offrent aux propriétaires qui voient leur situation financière changer et qui cherchent à gérer leur budget. Voici quelques exemples :
- Choisir de nouvelles modalités de prêt hypothécaire qui réduisent le coût du service de la dette, par exemple, allonger la période d’amortissement (voir le Rapport sur le secteur des prêts hypothécaires résidentiels – automne 2023).
- Réduire leur niveau d’épargne.
- Diminuer la consommation de biens et de services non essentiels.
- Reporter des achats importants.
- Vendre leur propriété de façon anticipée.
- Accorder la priorité aux paiements hypothécaires au lieu du remboursement d’autres produits de crédit (cartes de crédit, prêts automobiles et marges de crédit).
En fin de compte, les 15 milliards de dollars supplémentaires qui seront consacrés aux paiements hypothécaires viendront réduire les dépenses dans d’autres secteurs de l’économie, par exemple la consommation et l’investissement.
Même si les ménages canadiens feront ce qu’il faut pour essayer d’arriver à la fin du mois, de nouvelles hausses de taux d’intérêt pourraient exercer une pression supplémentaire sur les ménages qui éprouvent déjà des difficultés. De plus, d’autres indicateurs de comptes en souffrance montrent qu’une proportion croissante de personnes au Canada peinent à rembourser leurs dettes – même si les prêts hypothécaires en souffrance demeurent stables et qu'ils sont à des niveaux exceptionnellement bas. C’est signe que les ménages pourraient être soumis à des pressions financières plus généralisées. Cette situation, que l’on peut observer au-delà des arriérés hypothécaires, entraîne des conséquences sur la santé financière globale des ménages canadiens.
En ce qui concerne le paiement des autres dettes, la hausse des arriérés semble indiquer que les tensions financières s’accentuent pour un nombre croissant de ménages. En fait, les taux de comptes en souffrance depuis 90 jours ou plus ont augmenté dans la dernière année pour les cartes de crédit (+0,24 %), les prêts automobiles (+0,22 %), les marges de crédit (+0,16 %) et les marges de crédit hypothécaire (+4 %) (voir le Rapport sur le secteur des prêts hypothécaires résidentiels – automne 2023).
Selon l’Enquête auprès des emprunteurs hypothécaires menée par la SCHL en 2023, la moitié des emprunteurs directement touchés par l’augmentation des frais du service de la dette ont du mal à continuer de faire certains paiements, y compris les paiements hypothécaires. Ce chiffre grimpe à 74 % lorsqu’on inclut les personnes qui prévoient être touchées au cours de l’année à venir.
La SCHL est bien placée pour faire face aux cas de défaut potentiels
L’assurance prêt hypothécaire est obligatoire pour les emprunteurs dont la mise de fonds est inférieure à 20 % du prix d’achat de l’habitation. Cette assurance protège les prêteurs en cas de défaut tout en permettant aux gens ayant une plus petite mise de fonds d’obtenir un prêt hypothécaire à un taux d’intérêt concurrentiel. La diminution du risque permet à ce type d’acheteur d’accéder à un financement hypothécaire en période de ralentissement économique, lorsque la disponibilité du crédit hypothécaire est souvent réduite. En outre, la stabilité des marchés financiers et immobiliers s’en trouve accrue.
Tout le secteur de l’assurance hypothécaire a atteint un creux record en 2023. En fait, la SCHL assure actuellement environ 6,5 % de tous les prêts hypothécaires résidentiels au Canada. De plus, les prêts en souffrance et les demandes de règlement demeurent à des niveaux historiquement bas. Dans ce contexte, l’exposition de la SCHL au risque de renouvellement reste faible.
La majeure partie du risque associé à un choc des taux d’intérêt concerne le segment des prêts non assurés. Au Canada, environ 75 % des prêts hypothécaires résidentiels ne sont pas assurés. Il s’agit d'une proportion beaucoup plus élevée qu’en 2016, où seulement 45 % des prêts hypothécaires n’étaient pas assurés. Cette tendance à la hausse est en partie due à une série de changements réglementaires, dont bon nombre ont resserré les règles d’admissibilité à l’assurance prêt hypothécaire. De plus, les prix des habitations étaient élevés dans de nombreux marchés au cours des 10 dernières années. Résultat : davantage de propriétés avoisinent ou dépassent maintenant la limite permise pour les prêts assurables, qui est de 1 million de dollars.
En plus des niveaux élevés d’endettement hypothécaire au Canada, d’autres pressions financières pèseront lourdement sur les propriétaires au cours des prochaines années. Même si les emprunteurs surendettés continueront d’utiliser les solutions dont ils disposent pour s’assurer de payer leurs mensualités, ils courent un risque accru de cas de défaut. Et dans une économie au ralenti, ce risque est particulièrement élevé.