Dans ces circonstances, plus des deux tiers des promoteurs et des investisseurs ont indiqué qu’il était de plus en plus difficile d’aller de l’avant avec de nouveaux projets. Ainsi, ces derniers se sont adaptés de plusieurs façons. Ils ont soit réduit l’offre potentielle de logements locatifs, soit modifié leurs stratégies pour faire avancer leurs projets de construction. L’Enquête sur la construction de logements locatifs au Canada (PDF) a été réalisée au début de 2023.
Voici ce que révèlent ses résultats, étant donné le contexte actuel :
- La plupart des promoteurs, surtout les petits ayant un endettement élevé, étaient plus susceptibles d’interrompre leurs projets de nouveaux immeubles ou de réduire considérablement le nombre de leurs projets à venir (les immeubles de logements destinés à la location ont en moyenne des ratios de 60 - 70 % de dette pour 30 - 40 % d’avoir propre foncier). Environ 40 % des promoteurs immobiliers ont indiqué qu’ils réduiraient leur nombre de projets dans l'avenir et plus de 30 %, qu’ils mettraient leurs nouveaux projets
- Les promoteurs ayant des réserves importantes de capitaux et des horizons de placement à long terme sont susceptibles d’être plus actifs dans la construction d’immeubles de logements destinés à la location. En effet, ce type d’immeuble nécessite des fonds propres initiaux beaucoup plus élevés que les immeubles de copropriétés devant être financés. Les immeubles de logements destinés à la location génèrent des rendements positifs sur une longue période.
- Seulement 10 % des ensembles résidentiels devraient être planifiés et construits en vue d’être vendus (comparativement à 25 % dans le passé). La stratégie de leurs promoteurs est de maximiser la valeur obtenue en vendant l’immeuble à une autre société d’investissement.
- Parallèlement, dans plus de 50 % des cas, la stratégie consiste plutôt à construire les ensembles pour faire fructifier les investissements. Autrement dit, les promoteurs ont l'intention de conserver et d'exploiter les nouveaux immeubles locatifs à long terme (10 ans et plus).
Pour la majorité des immeubles locatifs dont la construction a été planifiée en 2022, les rendements limités ont incité les promoteurs à interrompre ou à annuler leurs projets. Les promoteurs qui ont plutôt décidé d’aller de l’avant ont jugé nécessaire d’augmenter les loyers pour compenser la hausse des coûts d’emprunt, d’aménagement et de construction. Soulignons qu’il faut plusieurs années pour planifier et construire un immeuble de logements collectifs; le temps nécessaire peut varier d’une ville à l’autre et être plus long dans certaines régions.
Selon des résultats de recherche, d'importants ajustements financiers doivent être réalisés pour assurer la viabilité financière. Il faut notamment augmenter les loyers, utiliser des matériaux de moindre qualité ou réduire la superficie des logements. Dans ce contexte, les conditions économiques et financières contribuent à la détérioration de l'abordabilité des logements locatifs qui entreront sur le marché à l'avenir.
Les grands promoteurs du secteur locatif ont une incidence importante sur l’abordabilité potentielle
Parmi les logements locatifs qui seront construits durant les prochaines années, plus de 3 sur 4 le seront par des promoteurs de grands immeubles (1 000 logements et plus), selon les résultats de l’enquête. Ces promoteurs représentent en outre 90 % des répondants qui ont dit utiliser le financement du secteur public, comme les programmes de la SCHL. Ils intègrent donc une part accrue de logements abordables dans leurs portefeuilles. Toutefois, la stratégie la plus courante chez les promoteurs serait de construire des logements en vue de les louer aux loyers du marché.
Les partenariats entre les grands investisseurs institutionnels, comme les caisses de retraite, les sociétés ouvertes (c’est-à-dire les fiducies de placement immobilier) et les promoteurs privés, peuvent permettre de réduire les coûts initiaux et d’améliorer l’accès à d’autres options de financement. Il a été mentionné que ces partenariats étaient de plus en plus utilisés pour construire des logements locatifs.
Les promoteurs de grands immeubles semblent s’intéresser davantage aux occasions de créer des logements abordables. La collaboration et les partenariats entre les différents types de promoteurs et d’investisseurs seront essentiels à l’avenir pour l’écosystème de la construction de logements locatifs.
De récents changements réglementaires et stratégiques visent à remédier aux défis d’ordre financier dans le secteur du logement locatif
La plupart des promoteurs ont accès à des capitaux privés et à des prêts traditionnels pour financer leurs investissements. Cependant, l’environnement économique récent a limité la disponibilité du crédit traditionnel, ce qui reflète une diminution de l’appétit pour le risque chez les prêteurs traditionnels. En fait, les promoteurs ont perçu un changement important dans la disponibilité et le coût du financement pour la construction résidentielle.
Dans ce contexte :
- Les deux tiers des répondants à l’enquête ont mentionné qu’il est de plus en plus difficile de mener leurs activités dans le contexte du marché financier actuel.
- Plus de 9 répondants sur 10 ont indiqué qu’il n’était plus possible de construire des immeubles de logements destinés à la location avec des sources de financement traditionnelles.
- Plus de la moitié des répondants à l’enquête ont utilisé le programme d’assurance prêt hypothécaire de la SCHL appelé APH Select. Face au besoin de construire des logements abordables, beaucoup de promoteurs semblent réagir en utilisant davantage les produits et les programmes de la SCHL.
- Les programmes de la SCHL, dont APH Select, pourraient offrir une occasion essentielle : celle d’aider à redéfinir la façon dont le marché aborde la planification et la construction de logements destinés à la location au Canada, malgré l’utilisation croissante d’autres sources de financement, comme les produits à faible coût de la SCHL.
Face à ce contexte financier de plus en plus restrictif, le gouvernement fédéral a récemment introduit de nouveaux changements législatifs et stratégiques pour stimuler la construction de logements locatifs.
Amélioration du programme des Obligations hypothécaires du Canada (OHC) : Le gouvernement a annoncé le déblocage de 20 milliards de dollars de financement à faible coût pour la construction d’immeubles de logements locatifs. Ces fonds devraient permettre de construire 30 000 appartements de plus par année.
Élimination de la taxe sur les produits et services (TPS) pour les nouveaux logements destinés à la location : Ce changement législatif entré en vigueur en septembre 2023 vise à encourager la construction de logements locatifs, de logements pour étudiants et de logements pour personnes âgées. À titre d'exemple, pour un appartement locatif de 2 chambres d'une valeur de 500 000 $, le remboursement de la TPS pour logements locatifs offrirait un allègement fiscal de 25 000 $.
L’Enquête sur la construction de logements locatifs au Canada (PDF) permet à la SCHL de recueillir des données et des observations des membres du secteur. Elle souhaite ainsi remédier aux lacunes dans les connaissances, qui continuent de nuire à la pleine compréhension de ce dont nous avons besoin pour accroître l’offre de logements locatifs.
Pour poursuivre les efforts visant à combler ces lacunes, nous mènerons l’Enquête de 2024 en janvier auprès des promoteurs et des investisseurs actifs sur le marché locatif dans l’écosystème canadien actuel.